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comme probable que l’Apocalypse est l’ouvrage de l’apôtre Jean, ou du moins qu’elle fut acceptée par lui et adressée aux Églises d’Asie sous son patronage[1]. La forte impression des massacres de l’an 64, le sentiment des dangers que l’auteur a courus, l’horreur de Rome, nous semblent bien convenir à l’apôtre qui, selon notre hypothèse, avait été à Rome et pouvait dire, en parlant de ces tragiques événements : Quorum pars magna fui[2]. Le sang l’étouffe, injecte ses yeux, l’empêche de voir la nature. L’image des monstruosités du règne de Néron l’obsède comme une idée fixe. — Mais des objections graves rendent ici la tâche du critique bien délicate. Le goût du mystère et de l’apocryphe qu’avaient les premières générations chrétiennes a couvert d’une impénétrable obscurité toutes les questions d’histoire littéraire relatives au Nouveau Testament. Heureusement, l’âme éclate en ces écrits anonymes ou pseudonymes par des accents qui ne sauraient mentir. La part de chacun est, dans les mouvements populaires, impossible à

    Daniel, d’Hénoch, en observant toutefois que, pour ces sortes de livres, l’auteur prétendu est séparé de l’auteur réel par des siècles, tandis que, dans le cas de l’Apocalypse, l’auteur réel et l’auteur prétendu auraient été contemporains.

  1. Voir l’introduction, en tête de ce volume.
  2. Comparez la position d’Élie Marion en Angleterre après les massacres des Cévennes.