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grand mausolée qui dominait la colline des Jardins (le Pincio), et faisait un bel effet du Champ de Mars[1]. De là son fantôme hanta le moyen âge comme un vampire ; pour conjurer les apparitions qui troublaient le quartier, on bâtit l’église Santa-Maria del popolo.

Ainsi périt à trente et un ans, après avoir régné treize ans et huit mois, le souverain, non le plus fou ni le plus méchant, mais le plus vain et le plus ridicule que jamais le hasard des événements ait porté aux premiers plans de l’histoire. Néron est avant tout une perversion littéraire. Il était loin d’être dépourvu de tout talent, de toute honnêteté, ce pauvre jeune homme, enivré de mauvaise littérature, grisé de déclamations, qui oubliait son empire auprès de Terpnos ; qui, recevant la nouvelle de la révolte des Gaules, ne se dérangea pas du spectacle auquel il assistait, témoigna sa faveur à l’athlète, ne pensa durant plusieurs jours qu’à sa lyre et à sa voix[2]. Le

  1. Pour que Lactance ne connût pas ce monument quand il écrivait son traité De mortibus persecutorum (chap.2 : « ut ne sepulturæ quidem locus in terra tam malæ bestiæ appareret » ), il fallait qu’il n’eût pas encore été à Rome. On croit voir de nos jours les traces de la villa des Domitius dans le mur de Rome à l’extrémité de la promenade du Pincio. (Platner et Bunsen, Beschreibung der Stadt Rom, III, 2e partie, p. 569-571.)
  2. Dion Cassius, LXIII, 26.