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lution de ne pas reculer comme ayant été le fait d’un petit nombre d’énergumènes, entraînant de force après eux des bourgeois tranquilles, qui n’eussent pas mieux demandé que de se soumettre. Il en est le plus souvent ainsi ; on n’obtient de grands sacrifices d’une nation sans dynastie[1] qu’en la terrorisant. La masse est par essence timide ; mais le timide ne compte pas en temps de révolution. Les exaltés sont toujours en petit nombre, mais ils s’imposent en coupant les voies à la conciliation[2]. La loi de pareilles situations est que le pouvoir tombe nécessairement aux mains des plus ardents et que les politiques y sont fatalement impuissants.

Devant cette fièvre intense, grandissant chaque jour, la position du parti modéré[3] n’était plus tenable. Les bandes de pillards, après avoir ravagé la campagne, se repliaient sur Jérusalem ; ceux qui fuyaient les armes romaines venaient à leur tour s’entasser dans la ville, et l’affamaient. Il n’y avait aucune

  1. Une dynastie n’est elle-même au fond qu’un terrorisme permanent et réglé.
  2. Voir en particulier ce qui se passa dans Tibériade. Jos., B. J., III, ix, 7-8 ; Vita, 65. Le fanatisme musulman est de même, dans la plupart des cas, le fait d’une minorité, qui domine toute une population.
  3. Οἱ μέτριοι, comme les appelle quelquefois Josèphe.