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maisons impériales du Palatin, la maison « transitoire » elle-même, avec ses dépendances, tout le quartier environnant, furent abîmés[1]. Néron évidemment ne tenait pas beaucoup à ce qu’on sauvât sa résidence. La sublime horreur du spectacle le transportait. On voulut plus tard que, monté sur une tour, il eût contemplé l’incendie, et que là, en habit de théâtre, une lyre à la main, il eût chanté, sur le rhythme touchant de l’élégie antique, la ruine d’Ilion[2].

  1. Pour l’étendue de l’incendie, voir la discussion topographique de Noël des Vergers, art. Néron, dans la Nouvelle biogr. générale, t. XXXVII, col. 729-730.
  2. Le récit de Tacite (Ann., XV, 39) exclut cette circonstance. Tacite parle, il est vrai, d’un bruit selon lequel Néron, pendant l’incendie, aurait chanté la ruine de Troie « sur son théâtre domestique ». Ce fait, s’il était exact, n’aurait pu se passer qu’à Antium ; ce qui serait bien gauche. Il est évident que Tacite rapporte ce bruit sans l’adopter. Les récits de Suétone et de Dion ne concordent pas dans les détails : l’un place la scène aux Esquilies, l’autre au Palatin. — L’anecdote vint sans doute du poëme intitulé Troica, que Néron composa et lut en public l’année suivante, et qui offrait un double sens, comme le poëme de Lucain intitulé Catacausmos Iliacus, composé vers le même temps. Dion Cassius, LXII, 29 ; Servius ad Virg., Georg., III, 36 ; Æn., V, 370 ; Perse, i, 123 ; Stace, Silv., II, vii, 58-61 ; Juvénal, viii, 221 ; Pétrone, p. 105 (édit. Bücheler). L’inconvenance de pareilles allusions frappa tout le monde, et fit dire que Néron « jouait de la lyre sur les ruines de la patrie ». (L’expression patriæ ruinis est dans Tacite, Ann., XV, 42.) Cette phrase sera devenue une anecdote, et, comme la