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taient ici comme un legs de la plus respectable antiquité. Ces chrétiens avaient été de dévots païens, avant d’adopter les idées venues de Syrie ; peut-être en les adoptant n’avaient-ils pas cru rompre formellement avec leur passé. Et d’ailleurs, quel est l’homme vraiment religieux qui répudie complètement l’enseignement traditionnel à l’ombre duquel il sentit d’abord l’idéal, qui ne cherche pas des conciliations, souvent impossibles, entre sa vieille foi et celle à laquelle il est arrivé par le progrès de sa pensée ?

Au IIe siècle, ce besoin de syncrétisme prendra une importance extrême et amènera le plein développement des sectes gnostiques. Nous verrons, à la fin du ier siècle, des tendances analogues remplir l’Église d’Éphèse de troubles et d’agitation. Cérinthe et l’auteur du quatrième Évangile partaient au fond d’un principe identique, de l’idée que la conscience de Jésus fut un être céleste distinct de son apparence terrestre[1]. Dès l’an 60, Colosses était déjà atteint du même mal. Une théosophie mêlée de croyances indigènes[2], de judaïsme ébionite[3], de philosophie[4], et de données empruntées à la prédication

  1. Irénée, Adv. Hær., I, xxvi, 1.
  2. Concile de Laodicée de l’an 364, canons 35 et 36 ; Théodoret, sur Col., ii, 17 et 18.
  3. Col., ii, 11-12, 16-23.
  4. Col., ii, 8.