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Judée et de fuir vers les montagnes[1]. Toujours est-il que les Évangiles synoptiques portèrent profondément le signe de ces angoisses ; ils en gardèrent comme une marque de naissance, une empreinte indélébile. Aux tranquilles axiomes de Jésus, se mêlèrent les couleurs d’une apocalypse sombre, les pressentiments d’une imagination inquiète et troublée. Mais la douceur des chrétiens les mit à l’abri des folies qui agitaient les autres parties de la nation possédées comme eux des idées messianiques. Pour eux, le Messie était venu ; il avait été au désert ; il était monté au ciel depuis trente ans ; les imposteurs ou les exaltés qui cherchaient à entraîner le peuple derrière eux étaient de faux christs et de faux prophètes[2]. La mort de Jacques et peut-être de quelques autres frères[3] les portait, d’ailleurs, de plus en plus à séparer leur cause de celle du judaïsme. En butte à la haine de tous, ils se consolaient en songeant aux préceptes de Jésus. Selon plusieurs, Jésus avait prédit qu’au milieu de toutes

  1. Matth., xxiv, 16 ; Marc, xiii, 14 ; Luc, xxi, 21.
  2. Comp. Jos., Ant., XX, viii, 6, 10, à Matth., xxiv, 5, 11, 23, 26 ; Marc, xiii, 6, 21, 22 ; Luc, xxi, 8.
  3. Τινὰς ἑτέρους, dit Josèphe, Ant., XX, ix, 1. Mais il n’est pas sûr que ces « quelques autres » fussent chrétiens.