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entre aussi un pauvre en habits sales, que vous disiez au premier : « Toi, prends cette bonne place, » et que vous disiez au pauvre : « Toi, reste debout, » ou bien « Assieds-toi sous l’escabeau de mes pieds » ; n’est-ce pas là ce qui s’appelle faire des distinctions entre frères, vous établir juges, dans le mauvais sens ? Écoutez, mes frères bien-aimés. Dieu n’a-t-il pas choisi les pauvres selon le monde pour les enrichir selon la foi et les constituer héritiers du royaume qu’il a promis à ceux qui l’aiment ? Et après cela, vous faites affront au pauvre ! Ne sont-ce pas les riches qui vous tyrannisent et qui vous traînent devant les tribunaux ? Ne sont-ce pas eux qui blasphèment le beau nom[1] qu’on prononce en vous nommant[2] ?…

L’orgueil, la corruption, la brutalité, le luxe des riches sadducéens étaient, en effet, arrivés à leur comble[3]. Les femmes achetaient d’Agrippa II le pontificat pour leur mari à prix d’or[4]. Martha, fille de Boëthus, l’une de ces simoniaques, quand elle allait voir officier son mari, faisait étendre des tapis

  1. C’est-à-dire le nom de « Christ », d’où christianus est dérivé.
  2. Jac., ii, 1 et suiv.
  3. Talm. de Bab., Ioma, 9 a, 35 b ; Derenbourg, Hist. de la Palest., p. 234-236.
  4. Ainsi Martha, fille de Boëthus, pour Jésus fils de Gamala. Mischna, Jebamoth, vi, 4 ; Talm. de Bab., Jebamoth, 61 a ; Ioma, 18 a ; Jos., Ant., XX, ix, 4, 7 ; Derenbourg, Hist. de la Pal., p. 248-249.