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est partout. Mais la Réforme, qui a rendu tant de services à la science et à la raison, n’a pas su faire une légende. Rome, jetant un voile complaisant sur les rudesses de l’Épître aux Galates, élève Paul sur un piédestal presque égal à celui de Pierre. Paul n’en devient pas davantage le saint du peuple. Quelle place lui fera la critique ? Quel rang lui assignera-t-elle dans la hiérarchie de ceux qui servirent l’idéal ?

On sert l’idéal en faisant le bien, en découvrant le vrai, en réalisant le beau. En tête de la procession sainte de l’humanité, marche l’homme du bien, l’homme vertueux ; le second rang appartient à l’homme du vrai, au savant, au philosophe ; puis vient l’homme du beau, l’artiste, le poëte. Jésus nous apparaît, sous son auréole céleste, comme un idéal de bonté et de beauté. Pierre aima Jésus, le comprit, et fut, ce semble, malgré quelques faiblesses, un homme excellent. Que fut Paul ? — Ce ne fut pas un saint. Le trait dominant de son caractère n’est pas la bonté. Il fut fier, roide, cassant ; il se défendit, s’affirma (comme on dit aujourd’hui) ; il eut des paroles dures ; il crut avoir absolument raison ; il tint à son avis ; il se brouilla avec diverses personnes. — Ce ne fut pas un savant ; on peut même dire qu’il a beaucoup nui à la science par son