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Agrippa II, qu’il avait enlevée, par des pratiques infâmes[1], à son premier mari, Aziz, roi d’Émèse. Il n’y avait crime dont on ne le supposât capable ; on alla jusqu’à l’accuser d’exercer le brigandage pour son propre compte[2] et de se servir du poignard des sicaires pour satisfaire ses haines[3]. Voilà les hommes auxquels les plus hautes fonctions étaient dévolues depuis que Claude avait tout livré aux affranchis. Ce n’étaient plus des chevaliers romains, de sérieux fonctionnaires comme Pilate, ou Coponius ; c’étaient des valets cupides, orgueilleux, dissolus, profitant de l’abaissement politique de ce pauvre vieux monde oriental pour se gorger à leur aise et se vautrer dans la fange[4]. On n’avait pas encore vu quelque chose de si horrible ni de si honteux.

Le chef d’escouade qui avait amené Paul remit à Félix, dès son arrivée, l’elogium et le prisonnier. Paul comparut un instant devant le procurateur, qui s’informa de quel pays il était. L’elogium constituait à l’accusé une situation privilégiée[5]. Félix dit qu’il entendrait la cause, quand les accusateurs seraient

  1. Tacite, Hist., V, 9.
  2. Tacite, Ann., XII, 54.
  3. Jos., Ant., XX, viii, 5.
  4. Tacite, Hist., V, 9.
  5. Digeste, XLVIII, iii, 6.