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rait dû l’être, pourquoi ne le dit-il pas, quand Paul, dans trois de ses épîtres[1], consacre à ce projet des pages entières ? On ne saurait nier que Simon le Magicien, dans la plupart des cas où la tradition chrétienne s’occupe de lui, ne soit le pseudonyme de l’apôtre Paul[2]. Le récit d’après lequel cet imposteur aurait voulu acheter à prix d’argent[3] les pouvoirs apostoliques ne serait-il pas une transformation du mauvais accueil fait par les apôtres de Jérusalem à la collecte de Paul ? Il serait téméraire de l’affirmer[4]. Cependant, qu’un collège de docteurs malveillants ait présenté comme une tentative de corruption l’acte généreux d’un confrère qui n’était pas de leur avis, cela est fort admissible. Si les anciens de Jérusalem n’eussent pas été remplis des plus étroites pensées, comment expliquer l’étrange discours que leur prête l’auteur des Actes et qui trahit

  1. I Cor., xvi, 1 et suiv. ; II Cor., viii-ix ; Rom., xv, 26 et suiv.
  2. Voir ci-dessus, p. 303-304, note.
  3. Cf. Épître de Jude, 11.
  4. La difficulté contre cette hypothèse, c’est qu’on ne conçoit guère qu’à l’époque de la rédaction des Actes, l’empreinte première d’un mythe aussi injurieux à Paul eût été assez effacée pour que le rédacteur, essentiellement favorable à Paul, l’ait introduite en son récit sans en voir le sens original. Qu’il l’ait introduite pour distinguer Paul du Simon fictif des judéo-chrétiens, c’est ce qui est encore plus invraisemblable ; le rédacteur des Actes cherche plutôt à atténuer le crime de Simon qu’à l’exagérer.