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quand le morceau fut écrit. Mais cette objection se laisse résoudre, comme nous le verrons dans le cours du présent volume. L’auteur de l’Apocalypse ne fit qu’appliquer à son temps un ensemble d’idées dont une partie remontait aux origines mêmes de la croyance chrétienne, et dont l’autre s’y était introduite vers le temps de Caligula.

L’épître aux Colossiens a subi le feu d’objections bien plus graves. Il est sûr que les expressions employées dans cette épître pour exprimer le rôle de Jésus au sein de la Divinité, comme créateur et prototype de toute création[1], tranchent fortement sur le langage des épîtres certaines, et semblent se rapprocher du style des écrits attribués à Jean. En lisant de tels passages, on se croit en plein gnosticisme[2]. La langue de l’épître aux Colossiens s’éloigne de celle des épîtres certaines ; le dictionnaire est un peu différent[3] ; le style a plus d’emphase et de

  1. Col., i, 15 et suiv.
  2. Comp. Col., ii, 2-3.
  3. Notez πλήρωμα avec une nuance particulière (i, 19 ; ii, 9), l’expression τῷ κυρίῳ Χριστῷ (iii, 24), φανεροῦσθαι (iii, 4) pour la παρουσία du Christ, les mots composés πιθανολογία, ἐθελοθρησκεία, ὀφθαλμοδουλεία. L’emploi rare des particules, un goût remarquable pour les entassements de membres de phrase liés entre eux par le pronom relatif ou par le nexe participial, quelques autres petits idiotismes encore, sont peu conformes aux habitudes de Paul.