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La rage que ces derniers ressentirent contre le fondateur venait de la supériorité de Jésus, supériorité que celui-ci ne prenait aucun soin de dissimuler. Ses fines railleries, son esprit, son charme, son aversion pour les faux dévots, avaient allumé des haines féroces. Les apôtres, au contraire, étaient dénués d’esprit ; ils n’employèrent jamais l’ironie. Les pharisiens leur furent par moments favorables ; plusieurs pharisiens se firent même chrétiens[1]. Les terribles anathèmes de Jésus contre le pharisaïsme n’étaient pas encore écrits, et la tradition des paroles du maître n’était ni générale ni uniforme[2].

Ces premiers chrétiens étaient d’ailleurs des gens si inoffensifs, que plusieurs personnes de l’aristocratie juive, sans faire précisément partie de la secte, étaient bien disposés pour eux. Nicodème et Joseph d’Arimathie, qui avaient connu Jésus, restèrent sans doute avec l’Église en des liens fraternels. Le docteur juif le plus célèbre du temps, Rabbi Gamaliel le Vieux, petit-

  1. Act., xv, 5 ; xxi, 20.
  2. Ajoutons que l’antipathie réciproque de Jésus et des pharisiens semble avoir été exagérée par les évangélistes synoptiques, peut-être à cause des événements qui amenèrent, lors de la grande guerre, la fuite des chrétiens au delà du Jourdain. On ne peut nier que Jacques, frère du Seigneur, ne soit presque un pharisien.