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cédèrent et, quelques secondes après, bien que la pièce où se trouvaient les acteurs de cette petite scène intime fût séparée de l’antichambre par la salle à manger, ils percevaient distinctement des bruits de voix, des échanges de paroles rapides, une sorte de discussion enfin, engagée évidemment entre la vieille Catherine et les visiteurs auxquels elle avait ouvert.

Mme Noblet retira vivement sa main de celle de Gilbert, écouta et devint aussitôt d’une pâleur mortelle, en bégayant :

— C’est mon père, avec mon mari sans doute ! Ah ! ma tante, défendez-moi, ne les laissez pas entrer ici. Je ne veux pas les voir !

Elle avait jeté ses bras au cou de Mme Bertin qui lui répondit, en se dégageant de cette étreinte désespérée et en se dirigeant vers la porte :

— Ne crains rien, je suis ici chez moi, je vais le rappeler et le prouver à M. de Tiessant.

Et elle passa dans la salle à manger pour aller au devant de son beau-frère, qui, écartant la domestique, répétait en élevant la voix de plus en plus :

— Ma fille est ici, je veux lui parler. Son mari vient la chercher, c’est son droit !

M. Noblet, lui, ne disait rien ; il semblait même fort gêné. Évidemment il eût préféré moins de bruit.

À ce moment même, la veuve parut et, sans attendre l’apostrophe qu’allait lui lancer le père d’Éva, elle lui dit avec fermeté :

— Vous vous trompez ; personne, surtout vous