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Ce n’était là que le prélude de l’épouvantable lutte qui allait se produire et que les prêtres appelaient la guerre sainte.

Bientôt les massacres succédèrent aux combats et il surgit tout à coup un homme qui, par ses cruautés, rappela à l’Inde les plus horribles attentats des Thugs.

C’était Nana-Sahib, héritier par adoption des souverains de l’empire des Mahrattes.

Les Anglais allaient le surnommer : la furie sous la forme humaine.

Nana-Sahib avait demandé au gouvernement des Indes de succéder au reste de pouvoir de Badgi-Raou, son père adoptif, et sa demande avait été repoussée.

Sa résidence était Bithour, ville forte et munie d’un parc d’artillerie important. Là, au lieu de s’isoler dans son mécontentement, il recevait les officiers anglais, les invitait à des fêtes et à des chasses splendides, leur témoignant enfin la plus vive affection.

Mais lorsque la révolte éclata, on vit trop tard que la conduite du prince hindou n’était qu’un piège.

Le massacre des étrangers qui fuyaient Futtipour, fut sa déclaration de guerre. Il réunit autour de lui plus de dix mille cipayes révoltés et se dirigea vers Cawnpore, dont la garnison anglaise dut céder devant cette véritable armée.

Nana-Sahib avait promis la vie sauve aux Européens ; ils avaient la liberté de se retirer à Allahabab.

Sous le prétexte de les y envoyer lui-même, le prince les fit embarquer sur quarante bateaux, et lorsque ces bateaux furent au milieu du fleuve, on démasqua, par son ordre, une batterie qui mitrailla ces malheureux.

Les flots les engloutirent ; pas un seul n’échappa à la mort.

Le monstre n’avait épargné que quelques femmes, créatures infortunées dont le sort fut plus terrible encore que celui de celles qui avaient péri, car il les fit vendre à ses soldats.

Le mois suivant, Nana-Sahib fut cependant vaincu à Futtipour par le général Hawelock, et il se rejeta de nouveau dans Cawnpore, son repaire de bêtes fauves, mais pour en sortir bientôt, après avoir fait mettre les femmes et les enfants au premier rang sur ses remparts que battaient les canons anglais, après avoir envoyé en guise de boulets aux assiégeants les têtes de ses prisonniers.

Pendant ce temps-là les villes tombées au pouvoir de l’insurrection devenaient le théâtre des plus horribles attentats.

Les gens sans défense, les individus les plus inoffensifs étaient coupés en morceaux ou brûlés vivants ; on leur crevait les yeux, on leur arrachait la peau, on leur coupait les doigts des pieds et des mains. Les femmes étaient