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la ville noire. À part deux ou trois rues qui courent parallèlement à la mer et qui renferment quelques belles maisons arabes et arméniennes, ce ne sont que ruelles infectes et cases de bambous comme dans le Peltah de Calcutta.

Nous suivîmes une de ces rues qui faisait face au débarcadère ; elle nous conduisit sur le bord de la mer, auprès du temple de Sam-Kay. Il était fermé et nous dûmes, pour nous en faire ouvrir les portes, faire des offrandes de fleurs et de fruits au Dieu chinois des jardins.

Un bonze nous introduisit enfin dans l’enceinte, mais rien n’était digne de nous y retenir. La population bouddhiste de Singapour n’est guère composée que de Chinois assez misérables ou se souciant fort peu de leur divinité, de sorte qu’elle me parut un peu délaissée. La chose la plus curieuse de l’édifice était deux énormes lions de pierre, couchés de chaque côté de la porte. Leurs gueules étaient entrouvertes, et, à travers leurs dents, on pouvait voir et faire jouer à l’intérieur de la mâchoire deux grosses boules taillées dans le bloc même qui en remplissaient toute la cavité. Ce tour de force de sculpture nous prouvait assez l’origine chinoise des gardiens du temple.

Nous rejoignîmes la rivière par la même rue qui nous avait amenés, nous nous arrêtâmes quelques instants dans une espèce de chop-house tenu par un Polonais, dont je vous raconterai quelque jour la