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l’usage de l’huile de coco, et ses petites mains, aux ongles d’un rouge vif, les rejetaient à chaque instant en arrière avec un mouvement plein de hardiesse et de grâce. Son nez n’était pas trop épaté, ni ses pommettes trop saillantes. Sans tous ces bizarres ornements qui l’ornaient si peu, — au contraire ! — la danseuse malaise eût été une assez jolie femme. Les pas qu’elle formait étaient un mélange de gestes pudiques et obscènes. Par instants, elle semblait près de céder ; elle s’offrait nue, dans des poses lascives et avec des sourires pleins de promesses, aux désirs de son compagnon ; puis, tout à coup, au moment où il s’élançait vers elle, elle changeait subitement de physionomie et se drapait chastement dans son pagne de mille couleurs, en refusant même Un baiser.

La lutte dura ainsi plus d’une heure.

Bientôt les gongs précipitèrent la mesure, les tam-tams résonnèrent plus bruyants. Les bonds devinrent alors plus rapides, les attaques de l’homme plus répétées, ses gestes plus suppliants, ses menaces plus terribles et la résistance de la femme moins énergique. Soudain, au moment où le Malais brandissait au-dessus de la tête de sa compagne son terrible kriss flamboyant, elle laissa tomber son pagne jusqu’à ses pieds et s’élança dans ses bras avec un cri sauvage. Le vainqueur poussa un hurrah de triomphe, et, agitant devant lui son arme empoisonnée, il bondit à travers les rangs de la foule qui s’ouvrait sur son passage pour se perdre dans les massifs de la