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débarquâmes à l’entrée du port, dans la ville basse qui, sous l’Empire encore, était tout Batavia.

Il est curieux de remarquer que presque toutes les villes des pays tropicaux se divisent en deux parties distinctes. Indépendamment, de ces divisions ordinaires que font naître les races et les coutumes, on y trouve toujours, si l’on peut s’exprimer ainsi, la ville du travail et la ville de la paresse, la ville du mouvement et du bruit et la ville du calme et du repos.

L’homme construit d’abord sa demeure sur le bord de la mer, le plus près possible de l’endroit où ses navires viendront apporter dans sa nouvelle patrie les souvenirs et les richesses de l’ancienne. Il ne s’inquiète pas alors, dans son amour pour le gain, du climat ni de la température ; c’est seulement lorsque plusieurs générations ont payé un tribut funeste à l’insalubrité, qu’il pense à s’éloigner du danger.

C’est ce qui est arrivé à Batavia, qui est peut-être une des plus malsaines stations du monde. Ce n’est que pendant le laps de temps si court que l’île a été administrée au nom de la France, qu’on vit s’élever une nouvelle ville, à Weltevreden, tandis que l’ancienne ville, fondée sur les ruines de Jacatra, restait habitée seulement par les naturels et par les Chinois. Les négociants européens n’y gardèrent que leurs comptoirs. Une visite de quelques heures pendant la journée, suffit souvent pour leur donner ces fièvres endémiques qui déciment les équipages des navires sur rade.