Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/234

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Voyez passer cet officier de cavalerie, il a trente ans à peine et déjà son œil est terne, son front ridé, sa main tremblante par l’excès des boissons alcooliques. Sa voix est dure et menaçante, son bras ne se lève que pour frapper les femmes qui le fuient et les cipayes qui le craignent, en attendant qu’ils se révoltent contre son autorité.

Mais laissons là la vie intime des Anglais que nous ne sommes pas venus étudier dans l’Inde, heureusement pour eux, car je ne sais trop vraiment ce qu’il y aurait de bon à en dire, et terminons ici ce triste tableau.

C’est la promenade du cours William, large avenue qui s’étend entre le fort et le fleuve, qui réunit, dès que la nuit tombe, toutes les populations hétérogènes de la grande ville. Le Musulman et l’Indien y passent, la plupart du temps modestement enfouis dans une espèce de carrosse à deux roues traîné par des bœufs, mais le luxe d’attelage que déploient les Anglais est inouï. Londres envoie à sa colonie ses plus merveilleux chefs-d’œuvre de carrosserie. Ces splendides voitures, traînées à l’orientale, c’est-à-dire par des chevaux de sang pomponnés et caparaçonnés, entourés de porteurs de torches et d’éventails, présentent, sous les frais ombrages du cours, le plus éblouissant coup-d’œil. À travers les équipages, se glissent parfois deux palanquins marchant côte à côte, mystérieusement fermés par des tentures brillantes, qui ne cachent pas autre chose que deux amants