Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/213

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

J’étais tout entier à cet effrayant et sublime tableau, lorsqu’une secousse violente, suivie d’un craquement épouvantable de la mâture et d’un cri d’effroi de l’équipage, faillit m’arracher des manœuvres sous lesquelles mes bras étaient passés.

Nous venions de masquer complètement ; le vent ayant sauté cap pour cap ; le petit hunier avait été arraché de sa vergue.

— Amenez le grand hunier, carguez la misaine, aux bras de bâbord ! commanda Wilson, d’une voix calme et stridente qui dominait la tempête. Toute la barre à bâbord !

La situation du Raimbow était critique. Le hunier, collé contre le mât, ne faisait pas descendre sa vergue ; les hommes pesaient en vain sur les cargues de la misaine, rejetée à bord par la violence du vent.

— Les gabiers à serrer la misaine ! cria le commandant dans son porte-voix.

Vingt matelots sautèrent dans les haubans. Ce fut une chose affreuse que de les voir, à la lueur des éclairs, se hasarder dans cette mâture que chaque coup de tangage lançait de l’avant à l’arrière.

Le navire avait fini par abattre sur bâbord, grâce au petit foc qui avait été bordé à tribord, mais la tempête était dans toute sa violence. Nous filions au moins douze nœuds en nous rapprochant de la côte ; c’est-à-dire le cap au nord-ouest, Il me semblait voir se dresser déjà à notre avant la lugubre pagode noire