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Tanjore, une fort belle porte sculptée et chargée d’ornements en reliefs, que nous fûmes arrêtés par une foule considérable, au-dessus des flots de laquelle, porté en triomphe, s’élevait un Hindou sale et déguenillé, en l’honneur duquel cependant se poussaient toutes ces clameurs qui nous brisaient le tympan.

Ce personnage n’était pas autre chose qu’un pèlerin qui, après une absence de plusieurs années, revenait d’un pieux voyage à ce temple sacré de Badrinath, dont la flèche dorée s’élève au milieu des cimes les plus désolées de l’Himalaya.

Le malheureux que nous avions devant les yeux n’avait pas fait moins de cinq cents lieues pour aller adorer Brahma. Cette longue route, il l’avait faite pieds nus, jeûnant, couchant sur la terre, sans trêve ni repos, n’écoutant ni fatigues ni maladies, oubliant famille et amis, ne voyant ni obstacles ni dangers, mais seulement le but de son pèlerinage et la place qu’il devait lui donner auprès de Wischnou. Ses membres étaient brisés, ses bras décharnés et sa physionomie portait les traces des douleurs et des fatigues qu’il avait supportées.

Le lendemain de notre arrivée, nous rencontrâmes cet Hindou dont le triomphe avait été notre premier spectacle en entrant à Tanjore. De sa bouche même, nous apprîmes son histoire.

Riche marchand appartenant à la caste des vaischyas et désirant gagner pour lui et pour les siens une caste supérieure, élévation qu’un pèlerinage