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Si le prince Olsdorf avait eu sous les yeux cette lettre infâme, il en aurait reconnu l’écriture incorrecte et commune. Elle était évidemment de la même main que celle qui, trois années auparavant, lui avait été adressée à Saint-Pétersbourg avec des articles de journaux, pour lui apprendre son déshonneur.


IV

LA REVANCHE DE SARAH


Vu l’indiscrétion accoutumée du monde où Paul avait fait sa rentrée, depuis plusieurs mois, dans des conditions si peu explicables, il était surprenant que sa femme n’eût pas été renseignée plus rapidement sur sa conduite. En effet, parmi ses confrères que le jeune peintre rencontrait chaque jour, plusieurs avaient été les hôtes de la rue d’Assas ; mais ils s’étaient tus, les uns par indulgence pour des écarts qu’il avaient souvent commis eux-mêmes, les autres par respect pour l’épouse si lâchement trompée.

S’il en avait été autrement, Mme  Meyrin, mise en éveil dès la première heure, se serait révoltée sans nul doute et, par ses concessions incessantes, n’aurait pas encouragé, pour ainsi dire, son mari dans un despotisme qui devait un jour lui faire envisager l’inconstance comme un droit.

Peut-être alors aurait-elle repris facilement possession de fugitif, qui n’avait que le courage des faibles, cette sorte d’énergie dans le mal consistant à ne point oser revenir sur une faute, par lâcheté, de crainte de reproches mérités, ou par amour-propre, de peur de s’abaisser.