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gère, qui se montrait pour chacun d’eux si généreuse et charmante.

Car Lise Olsdorf, depuis son arrivée à Paris, avait usé de tous les moyens pour s’attacher les Meyrin. Elle les avait pris fort adroitement par tous les sentiments, bons et mauvais : l’orgueil, l’intérêt, l’amour maternel. Si les Meyrin recevaient quelques amis, s’il y avait chez eux une matinée musicale ; elle était toujours là, comme une intime de la maison, aidant pour ainsi dire Barbe à en faire les honneurs, et les Meyrin, on le comprend, parlaient bien haut de leur amie « la princesse ». De plus, celle-ci ne laissant échapper aucune occasion de faire des cadeaux à tous, tantôt un bijou au violoniste pour le remercier du plaisir qu’elle avait eu à l’entendre exécuter tel ou tel concerto, tantôt à Mme Meyrin une robe, une pièce d’argenterie, des dentelles pour le jour de sa fête, le renouvellement de l’année, l’anniversaire de son mariage ou de sa naissance, puis, à Nadèje, tous les colifichets qui pouvaient plaire à sa coquetterie de fillette.

En échange des toiles les plus insignifiantes de Paul, elle avait orné son atelier d’armes, de tentures, de bibelots de grand prix. Lorsque Frantz donnait un concert, la princesse se chargeait d’offrir des billets dans la colonie russe et, qu’elle les plaçât ou non, les Meyrin en encaissaient le prix. Ils avaient donc tous pour Lise Olsdorf une véritable adoration et en étaient arrivés à cet étrange sentiment, sans l’avouer toutefois, d’être fiers que Paul eût pour maîtresse une grande dame de laquelle ils avaient fait leur amie. Ils ne se disaient pas que chacun de ses présents était en quelque sorte le paiement de leurs complaisances, et ils faisaient fête à la petite Tekla, dont ils connaissaient bien le véritable père, lorsque la princesse l’envoyait rue de Douai avec sa nourrice.

Tels étaient les rapports des Meyrin avec Lise Olsdorf quand le prince, en arrivant brusquement à Paris et en y prenant l’attitude que nous savons, força sa femme à ne plus rejoindre son amant qu’en secret et à restreindre ses visites à la famille de l’artiste.

Mme Meyrin ne tarda pas à s’étonner de ne plus voir la