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GASPARD

— Il va y dire une messe !

— Ah ! dit le livreur, il m’en bouche un coin !

— Explique-moi, dit Gaspard, l’affaire de ton mari.

— Quand votre femme sera enceinte, dit la vieille, elle accouchera d’un singe et d’un hérisson !

— Ah ! ah ! ah ! fit le livreur.

— Ça, c’est causé ! fit le boueux.

— C’est pas des raisons, grand’mère : tu f’rais mieux d’être raisonnabe, dit tranquillement Gaspard.

Il la reprit par les coudes ; il la tenait serrée ; elle étouffait.

— Lâches ! Lâchez ! Voilà les chiens !

Les trains sifflaient toujours. Le boueux reprit :

— Demande-z-y si y aura d’ l’oignon c’t’ année.

Gaspard dit d’une voix lente :

— Grand’mère… pourquoi qu’ tu me r’connais ? Moi j’ te connais pas.

— Mon pauvre mari me vengera !

— Elle commence à nous poisser, dit le boueux.

— Viens nous-en, dit le livreur.

— Comment qu’il était ton mari ? demanda doucement Gaspard.

— Les cloches, les chiens ! fit la vieille. Votre femme accouchera aussi d’un mille-pattes, qui