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forces ; ils sont sauvés !… C’est cela qu’il a fait pour moi !

— Mais il est extraordinaire ! Qu’est-ce qui se passe ? C’est un fluide ? dit ma sœur passionnée.

— Ma petite amie, ne cherchez pas ! En ce monde il n’y a rien à chercher ! dit la duchesse. Dieu n’a pas voulu qu’on sache ! Mais je vous garantis que c’est le salut. Il habite à l’hôtel, près de la Madeleine ; il n’a pas le droit d’avoir un cabinet : il serait accusé d’exercice clandestin de la médecine ! Je vais vous donner un mot. Allez le voir tout de suite. Il vous fera, selon que vous êtes plus ou moins perméable, d’une à cinq séances : et vous deviendrez forte… comme moi ! Or, je vous assure, malgré ma mine et ma maigreur, que je suis forte… Car j’endure mon mari, mes enfants, mes petits-enfants, mon château, mes domestiques… mes parents, j’oubliais mes parents !… qui ont l’air morts depuis des années, mais qui revivent en moi avec toutes leurs misères, leurs rhumatismes, leurs mauvaises humeurs, leurs insomnies, la vessie de mon père, et la rate de ma mère ! Sans Balatour…, je serais au cimetière depuis longtemps !

Ma pauvre sœur bondit chez Balatour. Il ne lui donna rendez-vous que le lendemain. Rien à faire pour la guérir le jour même. Toutes les demi-heures entraient chez lui