mais tu es capable de sauver la France ! Je voudrais savoir, mon chéri — tu as onze ans déjà — comment tu te représentes la vie. Tu dois l’imaginer, tu dois vouloir des choses. Peut-être as-tu des passions ! Qu’est-ce que tu prétends faire de ton existence ?
Je le serrais contre moi ; je l’aimais tant ! Et c’était comme si je m’interrogeais moi-même, avec ma propre vie à recommencer. J’entendais Thierry respirer ; je mis la main sur son cœur, qui battait fort. Thierry ne répondait pas.
— Aimerais-tu être soldat ? demandai-je. Un grand soldat ? Commander toutes les armées de ton pays ?
— Oh ! je ne pense pas ! me répondit Thierry à mi-voix.
— Alors, lui dis-je d’une voix vibrante, aimerais-tu être un orateur ? Enseigner ce qui est bien ? Entraîner des foules vers le beau ?
— Ma foi non ! dit Thierry d’une voix résolue.
— Comme c’est curieux ! lui dis-je décontenancé. Alors, quel serait ton rêve ?
— Moi ?… Faire plaisir, me dit Thierry doucement.
— Ah ! Oui ?… Et de quelle manière ? repris-je assez surpris. En soignant, en soulageant, en dirigeant ?
— Non, dit Thierry d’une voix calme et