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DÉPART SOUS LES ÉTOILES

pauvre Flora : « Elle n’est pas morte ! C’est impossible ! » (la charité). Et je me disais : « Il est Français jusqu’à la moelle. Je n’ai qu’à l’empêcher de se gâter. L’avenir est sûr ! Je n’ai jamais vu un si beau feu !

— Dis-moi, Thierry, est-ce que tu n’es pas content de n’avoir jamais été enfermé dans ces lieux affreux où sont les autres enfants, et qui s’appellent des pensions et des collèges ?

— Mais peut-être… Je le crois, papa ! me dit vivement Thierry.

— Moi, j’y ai été ; je les connais, Thierry. Pendant dix ans, on m’a expliqué des choses que je ne comprenais jamais, et puni chaque fois que je demandais qu’on me les explique.

— Pauvre papa ! dit Thierry.

— Mon ambition, c’est de t’éviter ce malheur, lui dis-je. Je voudrais que tu saches peu de choses, mais que tu les entendes toutes !

— Merci, papa ! Merci ! Je t’aime ! Je t’aime encore plus que tout à l’heure ! m’a dit Thierry.

— Si c’est vrai, nous allons avoir la plus belle vie, repris-je avec enthousiasme. Finis ta valise !

— Oui, papa !

— J’essaierai de te préserver des gens grossiers et des imbéciles jusqu’à la majorité ? Est-ce que tu ne crois pas que c’est considérable ?