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CHRONIQUE D’UN TEMPS TROUBLÉ

œuvres d’art. C’était d’une sagesse… provisoire. Il nous paraît plus sage de ne pas voiler le problème.

Après ce préambule, elle but, et la bouche rafraîchie, lança :

— Les sens ! Eh bien, mesdames, je les trouve respectables, les sens ! Encore faut-il les éduquer ! Ils sont là braqués sur tout ce qui se voit, se goûte, s’entend, se touche ! (Deux abbés se mirent à prendre des notes.) Nous avons l’habitude d’appeler les tout petits des « anges ». Je le veux bien, mais prenons garde ! Ce sont des anges sensuels. Donnons-leur donc le plus tôt possible, par une vie avertie, le profond respect des organes créateurs. Bref, en un mot comme en dix, il y a une éducation de l’amour, qui doit être faite au foyer, parce que les parents seuls connaissent l’heure de la révélation opportune. M. le Chanoine Bour et M. le docteur Barre me le confirmaient ces jours-ci : l’âge de la puberté est redoutable ! Il est pour l’Esprit Malin l’occasion de faire vaciller l’âme de l’enfant, que d’anormales émotions envahissent et saisissent. Période douloureuse entre toutes, souligna Mme  Lherminat d’une voix grave, mais qu’il faut regarder… en face !

Sur ces mots, qu’elle répétait, elle fut applaudie par les femmes. Les hommes restèrent prudents. Mme  Lherminat trempa de