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ALLEMAGNE

trant à mon hôtel, qu’attendons-nous pour être forts… et respectables ? Nous les aurions à nos pieds. Et si heureux d’y être ! Ils seraient tenus, ils auraient un but précis. Ce sont des esclaves, qui ont besoin de se croire des maîtres. Et quand ils se sentent respectueux, c’est l’euphorie, donc la maîtrise.

Mais nous ne serons pas capables de leur donner cette joie !

J’ai fait mon bagage ; j’ai pris le train ; j’ai failli pleurer d’émotion en repassant la frontière…

Depuis deux jours, je revis ; j’essaie de remettre en place des idées ballottées dans ce pays dangereux, où j’ai toujours, toujours été si mal à l’aise. Comme je me sens latin ! Que la Germanie pèse à mon cœur !

Ce qui me pèse aussi, c’est d’aller raconter tout cela à Saint-Remy. À vous, c’est un plaisir. Je me réfugie dans votre esprit, qui m’aide et qui m’inspire. Mais Pont-sur-Indre !… Enfin, c’est la France ; je n’ai pas le droit de me plaindre.

Je vous écrirai, quand je serai revenu.