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CHRONIQUE D’UN TEMPS TROUBLÉ

clair et léger ; les Allemands, quand ils brûlent, brûlent comme la tourbe ; mais enfin il brûlait, semblait sympathique, m’a raconté cette révolution, qui fut brutale et courageuse. J’ai vu l’autre brasserie, celle où Hitler, payant d’audace, a menacé les ministres bavarois, et tiré une balle de revolver dans le plafond pour les effrayer puis prévenir ses troupes, massées dehors. Il a obtenu un serment. Le serment a été violé dans la nuit. Le lendemain, comme il défilait avec ses hommes, il a rencontré les mitrailleuses de Berlin. Trente-six morts, et lui-même jeté en prison. Je comprends que M. Rimmermann vibre encore !

Nous avons plusieurs fois déjeuné ensemble, oh ! pas pour le plaisir : je lui tendais le menu, il disait : « N’importe quoi ! » En fait, il avalait des hachis, arrosés de bière brune, mais en les avalant, il parlait d’Hitler. Il m’expliquait : « C’est un homme du peuple, mais qui n’est pas rude comme le peuple. C’est un combattant, mais pour qui les horreurs de la guerre sont vivantes : il fera tout, vraiment tout pour la paix ! Vous le savez bien, il tend sans cesse la main à la France. Et pourquoi, pourquoi la France ne lui répond-elle pas ?… Enfin, c’est un chaste, un végétation, un anti-alcoolique ; la sobriété est le premier article de sa morale. Il a proclamé : « Tant qu’un ou-