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C’est m’belle sour Nènette qu’a recopié n’lette fou d’on live qui j’as t’ach’té avou m’galant l’anneye passeye à l’fôre di Hève. Mi galant a s’ ach’té l’mainme.

Et elle prend dans son coffre un petit livre vert que les pages sont plus courtes et plus longues et qui collent ensemble qu’il faut mouiller son doigt pour tourner la page.

— Bien, je vais copier aussi alors, montrez-moi où il faut commencer.

L’aute feye, Nènette a fait in’ tèche d’intche wiss qu’elle a recopié. Voll’ là. Mains ji n’voreux nin qui vos prindahize les mainmes mots comme è live, il fâreut on pau cangi.

— Oui, mais s’il me faut changer, alors, moi je ferai des fautes.

I n’el sâreut veyi. Adon, prindan on pau è live et mettant co aut’choè avou.

Alors, en serrant fort ma plume, et poussant ma langue un peu hors de ma bouche, j’ai recopié au net hors du livre vert :

« Monsieur,

» La sincérité des sentiments que vous
» m’exprimez dans votre dernière missive,
» me fait une douce obligation d’y réciproquer.
» Ayant dû, jusqu’à présent, par un
» sentiment de réserve, que votre noble
» nature comprendra sans aucun doute, contenir
» au plus profond de mon être le flot
» tumultueux de sentiments sympathiques
» dont déborde mon cœur, il m’est doux, en
» cet instant charmant, de donner enfin libre