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Je fais bien attention que personne ne vient, et que mon oncle raccommode un usteye ou cloue des clous quelque part, et que ma tante parle du temps qu’il fera demain avec la femme aux cliquottes, ou bien qu’elle achète une losse de bois ou un traiteu à1 l’homme qui passe avec sa charrette et un chien. Alors, je suis sûr qu’ils resteront long¬ temps sans m’embêter. Et j’ôte le couvercle du tonneau, il colle souvent, et il faut faire attention parce qu’il vient tout d’un coup, et je manque de tomber avec.

Et puis…

Ah! qu’on a bon de pousser son doigt dans la sirope. C’est tout froid d’abord, comme de l’eau; mais on ne peut pas faire aller son doigt si vite comme dans l’eau, par¬ ce que c’est plus dur. Alors je fais comme un croc avec mon doigt replié et je le retire tout plein de sirope, comme c’est bon! Pas de pain, pas de beurre, et tant qu’il m’plaît.

D’abord ça plaque aux dents et ça fait une colle dans la bouche comme si ça ne voulait pas fondre. Mais je l’avale de force et ça me coule dans le bûseau, tout doux et lentement, comme quand il y a quelquefois un petit lumçon resté dans la salade et qu’on le sent passer comme ça quand il est trop tard pour tousser et le ravoir dehors.