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CHAPITRE NEUVIÈME

les plaies morales qui affligent son royaume et qui, si l’on n’y met promptement remède, menacent de s’élargir et de se multiplier de plus en plus. Pour longtemps encore le Roi sera en Piémont le maître de la situation. Il lui suffirait de vouloir pour donner à son gouvernement telle forme qui lui semblerait plus adaptée à l’état général du pays et pour faire à ses institutions les changements que commandent les circonstances et l’expérience. Le renversement même complet du statuto n’amènerait ici aucun désordre. On pourrait faire un coup d’État sans avoir besoin de tirer l’épée. À plus forte raison le pays resterait-il tranquille si le Roi usait enfin de l’autorité que la constitution même lui donne pour mettre un terme à des abus que la grande majorité de la nation, toujours si noble et honnête, condamne et maudit. Pour obtenir ce résultat il suffirait que le Roi le voulût, mais, à moins de quelque événement inattendu, Victor-Emmanuel n’aura pas la force de vouloir et laissera faire.

« Après le Roi, c’est le Sénat qui pourrait le plus facilement mettre un frein aux tendances révolutionnaires du gouvernement. Composé de grands propriétaires et d’hommes éminents dans toutes les branches de l’administration, il réunit dans son sein les plus grands noms, les plus grandes fortunes et les