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CHAPITRE SEPTIÈME

hors du pare de Moncalieri lorsque tout à coup elle rencontra une femme également accompagnée de ses enfants : « Ah dit une des princesses à ses frères, vous voyez ces petits enfants. Eh bien, moi, je sais qui ils sont. Ils sont aussi nos frères. On dit qu’ils sont comme nous les enfants de papa. »

À ces mots, la Reine rentra au château et se rendit chez Victor-Emmanuel pour se plaindre de ce honteux voisinage et le prier de lui épargner à l’avenir d’aussi pénibles humiliations.

Rosine ne se résignait pas à vivre renfermée chez elle. Elle assistait pendant le carnaval aux bals du Théâtre Royal. Elle y portait un énorme médaillon contenant le portrait du Roi. Comme elle ne savait pas s’habiller, elle l’avait accroché au bas d’une robe en pointe, de telle sorte qu’il se trouvait placé juste au milieu du bas ventre, ce qui donnait lieu aux plus grossières plaisanteries. Elle alla ainsi affublée inviter à danser plusieurs officiers qui refusèrent tous, ne voulant pas se donner en spectacle. Elle s’en plaignit au Roi, qui partagea son ressentiment. Victor-Emmanuel passait près d’elle sa vie entière, à la grande satisfaction de Cavour et de Rattazzi, à qui était ainsi abandonné le gouvernement du royaume, le souverain oubliant près de sa maîtresse l’accomplissement de ses devoirs les plus sérieux.