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MES SOUVENIRS

m’appuyant toujours sur elle. Si on m’y force, je donnerai le suffrage universel et j’irai moi-même parler aux électeurs. J’ai vu le paysan de près et je sais ce qu’il pense. Je ne veux pas qu’il soit la dupe d’intrigants comme il l’a été si longtemps. Nos ministres ne veulent pas voir qu’il s’agit pour toute la nation d’une question d’existence. Ils ont sans cesse derrière eux le fantôme de l’indépendance italienne qui a perdu notre malheureux pays, et ils n’osent pas divorcer avec le passé pour inaugurer une ère nouvelle dont le but doit être de cicatriser les plaies que nous a léguées un passé déplorable. »

Les intentions pacifiques de Victor-Emmanuel furent mises à l’épreuve des exigences exorbitantes de l’Autriche. Elle réclamait une indemnité de guerre de 200 millions, et le Piémont se déclarait dans l’impossibilité d’en payer plus de 60. Son budget ordinaire n’était en recettes que de 80 millions sur lesquels les événements avaient produit une baisse de 20 millions, tandis que les dépenses avaient doublé. La demande des Autrichiens équivalait au triple du budget. Pour acquitter cette indemnité en cinq années il eût fallu porter le budget à 120 millions. Un emprunt ne pouvait être contracté qu’à 70 francs : il eût représenté un capital de 260 millions et une quinzaine de millions d’intérêts annuels. Un petit