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n’avoir pas cru avant de sentir. La critique moderne s’inspire volontiers de saint Thomas.

38. Je ne quitterai pas ce sujet sans rappeler un passage étrange des Actes des Apôtres (18, 25) : « Il arriva à Éphèse un Juif nommé Apollos, originaire d’Alexandrie, homme éloquent et versé dans les Écritures. Cet homme prêchait et enseignait soigneusement ce qui concernait le Seigneur, bien qu’il ne connût que le baptême de Jean. » Ainsi, plusieurs années après la mort de Jésus, il se trouvait un homme instruit qui prêchait sa doctrine (c’est-à-dire l’avènement du royaume des cieux), sans avoir entendu parler de son supplice et sachant seulement que Jean avait baptisé. Si les anciens docètes ont cité ce passage, il devait être assez malaisé de leur répondre.

39. Saint Paul connaît seulement « Jésus crucifié ». Il a pu s’entretenir avec ceux qui avaient vécu près de lui, comme saint Pierre et saint Jacques ; mais, dans ses épîtres à des communautés lointaines, qui pourtant n’avaient pas encore d’Évangiles, il n’a jamais éprouvé le besoin d’entrer dans des détails sur la vie terrestre de Jésus. On peut dire néanmoins que les épîtres de saint Paul sont le meilleur témoignage historique que nous possédions sur Jésus, tant la qualité de tous les autres répond mal aux exigences de la critique. Si ces épîtres n’existaient pas, ou si elles n’étaient pas de saint Paul, ce qui a été affirmé, mais non démontré, il n’y aurait aucun paradoxe à révoquer en doute la réalité historique de Jésus.

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