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compte, que les diasceuastes du Rig aient toujours bien compris le sens des formules, déjà vieilles sans doute pour la plupart, dont ils se sont servis pour rédiger les hymnes. À combien plus forte raison ces mêmes formules doivent-elles être énigmatiques pour les commentateurs ! Aussi les travaux qu’ils ont accumulés, soit dans l’Inde même, soit en Occident, depuis que les études védiques y ont pris rang dans la science, ne suffisent pas pour que nous puissions nous flatter à l’heure qu’il est de posséder, à beaucoup près, la solution de tous les problèmes que ces textes nous présentent en détail ou dans leur ensemble. Un coup d’œil jeté sur l’œuvre des principaux interprètes du Rig-Véda nous permettra de nous rendre compte des desiderata qu’elle comporte.

Tout d’abord, les monuments de l’exégèse brahmanique, à commencer par l’ancien recueil lexicographique du Nirukta pour arriver jusqu’au plus récent, le commentaire perpétuel de Çayana, sont suspects à juste titre d’expliquer souvent les idées du passé par celles de l’époque qui les a vus naître. Quelque part qui ait été faite à la tradition dans ces ouvrages, il est hors de doute qu’elle est insuffisante pour assurer l’intelligence exacte et complète des conceptions sur lesquelles reposent les hymnes védiques. Et pourtant la méthode qui consistait à employer d’une manière presque exclusive ces instruments d’interprétation, surtout le dernier, bien qu’il ne remonte qu’au xive siècle de notre ère, est celle qui prévalut tout naturellement d’abord parmi les indianistes européens qui s’attaquèrent les premiers au Rig-Véda. Il en fut ainsi pour la traduction française de Langlois (1840-1852, réimprimée en 1872). Bergaigne était donc tout à fait autorisé à penser que la valeur scientifique en était à peu près nulle et que cette traduction était à refaire de fond en comble.

Dans les travaux d’interprétation générale ou partielle qui ont été entrepris, soit en Angleterre, par MM. Muir et Max Müller, soit en Allemagne, par MM. Kuhn, Roth, Grassmann et Ludwig, plus d’auxiliaires ont contribué à l’accomplissement d’une tâche plus largement comprise, plus d’efforts ont été consacrés à arracher le mot de ses énigmes au Sphynx védique. Non seulement