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journal de la commune

blique : c’est le secret de Polichinelle ; l’Assemblée elle-même n’a pas daigné s’en cacher un seul instant. Son premier complot a échoué. Qu’elle se le tienne pour dit, et qu’elle s’en aille avec les félicitations de M. de Bismarck. Et que la France la remplace par une députation nouvelle simplement, modestement, honnêtement républicaine.

Il y aurait donc un moyen bien simple et bien pratique de nous tirer tous d’embarras et d’éviter peut-être de terribles catastrophes. Mais qu’y a-t-il de plus rare que perles et diamants ? C’est le bon sens, c’est le sens commun. Et si la chose qui serait en même temps la plus simple et la plus pratique est en même temps celle dont personne ne veut — cette chose-là est de toutes la plus impratique !

De qui se compose cette Commune à laquelle les hasards du scrutin viennent de confier nos destinées ?

La Commune, composée d’une centaine de membres, comprend sur ce nombre une vingtaine de noms tolérablement connus. Que sont les autres ? L’avenir nous l’apprendra.

Il faut dire que peu d’élections se sont accomplies dans des conditions plus extraordinaires ! La veille encore, tous les pouvoirs officiels s’opposaient à l’élection ; la veille encore, il fallait pour que la votation eût lieu, que l’électeur arrivât à l’urne, son bulletin piqué à la baïonnette, à la baïonnette tachée du sang de quelque concitoyen ; la veille encore, plusieurs de ceux qui disaient la votation nécessaire la croyaient impossible. Tout d’un coup la votation devient possible par l’acquiescement à la dernière heure des maires récalcitrants ; maintenant on se précipite à l’urne avec son bulletin blanc. Quel nom y inscrire ?

Les noms des premiers venus ? C’est malheureusement ce qu’on fut obligé de faire la plupart du temps, puisque les journaux, puisque les assemblées électorales n’avaient pu discuter les candidatures. Dans les premières heures de la journée, on manquait même de listes. Cependant quelques feuilles républicaines parurent, proposant d’urgence tels et tels noms pour chaque arrondissement. S’il eût fallu, comme pour l’élection des députés de Paris, voter par scrutin de liste sur une centaine de noms à la fois, il eût été impossible d’en sortir. Peu à peu, on afficha sur les murailles des listes manuscrites, puis des émissaires de