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journal de la commune

« Non, Monsieur, il n’y en a pas deux ; mais, il faut que le drapeau qui doit réprimer l’insurrection, le Drapeau Tricolore, soit tenu en face de ce Drapeau Rouge que la France n’acceptera jamais… Ah ! Messieurs les maires, j’envie votre sort, quand je pense que vous êtes seuls dans Paris à pouvoir témoigner de votre courage. Songez que quand nous aurons réuni en un faisceau des forces, nous commencerons à être forts, (Très bien ! ) des soldats, électrisés par notre présence, marcheront sur l’émeute qui, à son tour, éprouvera la terreur qu’elle répand aujourd’hui. »

« M. Pouillard. — Ce sont là de généreuses illusions que nous n’avons pas le temps d’examiner. Nous ne pouvons pas nous-mêmes aller à Paris de nos personnes. Que le Gouvernement y envoie un général et des troupes, à la bonne heure ! Mais aller nous exposer en simples voyageurs, allons donc ! Il ne s’agit pas là d’une émeute ordinaire, mais des sociétés secrètes et de l’Internationale ! »

Le gros monsieur Batbie proteste lui aussi contre cette aventure. La majesté de l’Assemblée Nationale serait compromise si quelques-uns de ses membres, se mettant à la tête des bataillons de l’ordre, allaient affronter les canons du désordre. Et l’Assemblée abondant dans le sens du ventripotent Batbie, professeur orthodoxe d’économie politique, rejeta avec indignation la fantaisie du naïf villageois.

On croyait la séance finie, quand M. Jules Favre, infatigable dans sa haine, demanda une demi-heure pour insulter Paris, maudire encore cette insurrection maudite, puis pour affirmer ensuite qu’il n’avait pas menti en citant à faux certaine dépêche prussienne. Jusqu’à présent la Prusse n’a point intérêt à intervenir dans nos discussions civiles, sa haine est satisfaite. Elle doit grincer de joie en voyant que nous avons réservé nos forces pour nous entre-déchirer de nos propres mains : la Prusse ne se soucie que de ses cinq milliards, elle peut même perdre son gage, sa rancune pourrait même se féliciter que la rançon des cinq milliards ne soit point payée, pourvu que la France ruinée perde maintenant une dizaine de milliards en plus de tout ce qu’elle a déjà perdu, pourvu que le parti révolutionnaire et républicain, qui seul peut relever la France, qui seul peut