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journal de la commune

défendre spécialement l’Assemblée. Les officiers de ces 120 000 hommes seraient nommés par le Gouvernement, et les volontaires ne seraient pris que parmi d’anciens soldats.

Passons sur des incidents qui à d’autres époques auraient été considérés comme très importants, mais qui, dans notre tourmente, seront oubliés ce soir, ou demain déjà. L’épisode historique de la journée a été la réception faite aux maires de Paris, lesquels se sont présentés en corps devant l’Assemblée afin d’obtenir d’elle des mesures conciliatrices qui contrebalanceraient l’influence grandissante du Comité central. La Chambre ne se souciait guère de recevoir la municipalité de Paris, néanmoins elle n’osa pas refuser.

Entrèrent donc une soixantaine d’hommes, représentant officiellement une ville de deux millions d’âmes[1]. Ils étaient revêtus de leurs insignes, ils se tenaient avec une certaine fierté, conscients du grand rôle qu’ils voulaient jouer, celui d’intermédiaires entre la population de Paris et la population de la province. La gauche se lève devant eux. Elle les salue de la main en criant : « Vive la République ! Vive la France ! » Et les maires de répondre : « Vive la France ! Vive la République ! »

« À l’ordre ! à l’ordre ! » ont crié alors des champêtres furieux. « Rappelez-les à l’ordre ! À l’ordre ! à l’ordre ! Vous ne respectez pas l’Assemblée ! Faites-les évacuer ! Ils n’ont pas le droit de prendre la parole ! » Le vacarme et le tumulte augmentent alors de minute en minute. Finalement, les centres et la droite se retirent, entraînant dans la débandade générale le Président et les membres du Gouvernement. À leur tour, les députés de la gauche, les maires et adjoints sont emportés dans la grande déroute.

Députés de la gauche et maires de Paris n’auraient eu alors qu’une chose à faire : puisqu’on injuriait la République et Paris en leurs personnes, ils devaient immédiatement quitter Versailles et revenir siéger au Palais Bourbon, sous la protection du Comité central.

Mais ces Messieurs n’étaient point hommes à prendre une résolution aussi énergique. Pour repousser l’injure faite aux maires de Paris, les députés de Paris parlèrent un

  1. Ceux parmi eux qui sont députés entrent dans l’hémicycle, les autres restent dans une tribune latérale.