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journal de la commune

vement) Il est bon de mettre sous vos yeux les circonstances atténuantes plaidées par ce gouvernement qui n’a plus le droit de s’appeler la République : il la déshonore !

« L’amiral Saisset. — Oui, il la déshonore.

« M. Jules Favre. — Il la déshonore. Il la souille de sang. Il fait apparaître auprès d’elle le cortège de tous les crimes. Il ne peut être composé que de gens indignes, ne méritant aucune espèce de pitié… »

Suit un long plaidoyer en faveur des généraux fusillés, un long réquisitoire contre leurs assassins, c’est-à-dire contre la garde nationale de Paris.

« Permettez-moi de ne pas descendre de cette tribune sans épancher mon cœur en laissant échapper une des nombreuses douleurs qui l’oppressent… J’ai combattu trois jours durant l’exigence du vainqueur, et Dieu sait avec quelle insistance il voulait entrer dans Paris et désarmer la garde nationale ! J’avais cru qu’il était de mon devoir de lui épargner cette humiliation… Je me suis trompé. J’en demande pardon à Dieu et aux hommes ! »

L’émotion de la Chambre est indescriptible. Jules Favre est longuement acclamé et félicité.

Cependant, un des maires de Paris, plus pratique, moins aveuglé par la haine, répond à l’appel au massacre fait par M. Jules Favre, en renouvelant la proposition de la veille : « En convoquant vous-mêmes le peuple de Paris à voter dans vos urnes électorales, vous l’empêcherez d’aller voter dans celles du Comité central.

« J’arrive de Paris. Tous les maires sont réunis dans une mairie. Une grande partie des mairies est encore occupée par les anciens maires. Nous sommes en face des hommes de l’Hôtel-de-Ville, nous leur faisons échec. Je vois mieux que personne ce qui se passe. Paris peut être sauvé par des mesures de préservation. Je ne suis pas dans le secret des moyens dont dispose le Ministère. Mais une grande partie des bataillons de la garde nationale est armée de chassepots ; il y a des pantalons rouges avec les insurgés. Je ne vois pas que vous ayez la force… Je n’aime pas la division que M. le ministre veut faire naître entre Paris et la province… Si vous voulez adopter notre projet, la tranquillité renaîtra. Dans trois jours nous redeviendrons les maîtres de l’Hôtel-de-Ville, Mais si nous revenons ce soir