Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/397

Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
387
journal de la commune

rent pendant cinq ou six semaines le fusillement des gardes nationaux, mais continuèrent celui des ex-lignards, ce qui n’encourageait guère les nombreux soldats restés dans Paris à marcher dans les mêmes rangs que les gardes nationaux. Mais, riposte-t-on, les gardes nationaux étaient protégés par leur nouvel uniforme ? Tous n’avaient pu le revêtir. Bon nombre, comme c’est l’habitude des troupiers, s’étaient tatoués sur les bras et sur la poitrine le numéro de leur régiment avec les devises et des cœurs enflammés. Et les Versaillais ne manquaient pas de déshabiller leurs prisonniers de 21 à 28 ans trouvés avec ces marques — fusillés ! — Et la Commune ne les vengeait point. Ce fut seulement à l’explosion de la cartoucherie Rapp qu’il fut décidé qu’on tâcherait d’intimider les Versaillais en sacrifiant leurs otages. C’était trop tard.

Quant au plus important d’entre eux, l’archevêque, la Commune en proposa l’échange ; cet échange fut demandé par des membres du corps diplomatique, instamment réclamé par Monseigneur lui-même. Nous l’avons dit, M. Thiers refusa.

Ce fut seulement lorsque les prisonniers parisiens tombèrent par centaines et par centaines sous les balles des Versaillais entrés dans Paris que Raoul Rigault fit son œuvre de mort parmi les otages… Les vengeances sont toujours mauvaises surtout lorsqu’elles sont exercées par le plus faible contre le plus fort. Pour cent prisonniers fusillés par les Versaillais, les Parisiens n’ont pas fusillé cinq otages, mais pour dix otages fusillés par les Parisiens, les Versaillais ont pris prétexte pour fusiller cinq cents Parisiens. Tel est le fait ramené dans ses termes substantiels.

Il avait été entendu dès le début que si des otages devaient être sacrifiés, on commencerait par les prêtres. Du reste il n’y a guère eu que des prêtres pris pour otages.

Et pour ce qui est de Gustave Chaudey, c’est lui qui a ordonné la fusillade du 22 janvier. Il agissait pour le compte de Favre, Picard et Trochu et pour son propre compte. Il a fusillé le peuple, il a été fusillé lui-même. Du reste, il est mort très bien en criant : Vive la République !

Chaque heure de gagnée majore nos chances de vie… D’abord, c’était aussitôt pris, aussitôt fusillé, maintenant on a quelque répit, les chances de salut augmentent avec le