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journal de la commune

à coups si violents et si pressés, que tout Paris presque a pu croire que la bataille était dans Paris même. La canonnade et la mousquetterie se suivaient, se mêlaient avec fureur. Le ciel était sillonné d’éclairs aussi fréquents que des éclairs de chaleur, et qui étaient des éclairs de massacre. C’étaient les troupes de Versailles qui attaquaient les forts du sud : C’était le maréchal Mac-Mahon qui, entré le matin en possession du commandement, voulait marquer ses débuts par un grand coup, et tentait de forcer Paris par une surprise nocturne.

« L’horrible combat a duré une heure et demie avec cette effroyable intensité, puis, les coups se sont ralentis et ont bientôt tout à fait cessé.

« Mac-Mahon et les bataillons de Versailles étaient repoussés.

« La population, amassée dans les rues et sur les places, se souviendra néanmoins de l’angoisse et du supplice de cette soirée. Jamais, au temps du siège, le bombardement, jamais les sorties n’ont eu ce fracas et cet acharnement. Dans tous les groupes l’indignation était égale à la douleur. Et on ne savait lequel on devait le plus accuser et détester, du politique ou du militaire — de M. Thiers qui semble vouloir tendre à son tour aux Parisiens ce piège des négociations dans lequel l’ont fait tomber les Prussiens, — ou de M. Mac-Mahon qui ose essayer de prendre sur Paris sa revanche de Sedan. »

Paul Meurice.

Le fait est que tout d’un coup Paris soubresauta, surpris par ce formidable vacarme, et de minute en minute l’inquiétude allait croissant avec le bruit. Il venait à la fois du sud et de l’ouest. L’enceinte était attaquée sur plusieurs points, du côté de Montrouge, de Vanves, d’Issy et d’Asnières, d’Asnières dont s’est emparé par un intelligent coup d’audace, le général Dombrowski, pour avoir un pied sur l’autre rive de la Seine et prendre en face les assaillants de Neuilly.

Les boutiques se fermaient précipitamment, les cafés se vidaient, des groupes nombreux se formaient dans les rues et sur les places. Les hauteurs de Montmartre et de Belleville s’étaient couvertes de curieux. Regardant les lueurs