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l’homme et la terre. — iranie

ques et les siècles de l’Islam, provient moins de la nature, qui avait cependant dressé le rempart du Paropamisus, que des invasions ethniques vomies par les régions septentrionales. Largement ouvertes du côté du nord et du nord-ouest par les steppes des nomades, les campagnes du Iaxartes et de l’Oxus devaient être d’autant plus menacées qu’elles étaient mieux cultivées et parsemées de cités plus riches. Les hordes de pillards, guettant aux abords des colonies avancées et dans les défilés des montagnes, saisissaient la première occasion pour se ruer sur les contrées que leur livraient soit la guerre intestine, soit la trahison d’un ambitieux ou tout autre événement. Plus les incursions se répétaient, et plus changeait la proportion des races, les envahisseurs prenant en maints endroits la place des anciens résidants, exterminés ou refoulés vers les hautes vallées. À la fin, l’élément aryen, trop affaibli pour résister, se trouva rompu en maints endroits, le long des pentes de l’Hindu-kuch, ou ne put se maintenir dans certaines villes que toléré, asservi, souvent à condition d’abandonner sa langue et ses dieux. Ainsi des Turcs et des Mongols, connus sous divers noms : Turkmènes ou Turcomans, Kirghiz, Kara-Kalpak, Kaïzak, Burut, Uzbeg, occupent la plus grande partie du double bassin du Iaxartes et de l’Oxus, mêlés aux Sartes, c’est-à-dire aux gens de race croisée, chez lesquels l’élément aryen se trouve encore représenté.

Les seuls parents rapprochés des Iraniens du plateau méridional sont les Tadjik, c’est-à-dire les « Couronnés » des villes et de la Bactriane orientale, dans le voisinage des monts. Encore leur type est-il assez impur et leur langue fortement mélangée de paroles et de tournures turques et mongoles. À l’arrivée des Russes dans la Turkménie, il n’y avait plus de groupes strictement aryens que dans les combes des hautes montagnes, sur le versant occidental des Pamir, dans le Karategin, le Darvaz, le Badakchan.

Par leurs invasions dans les terres aryennes des deux fleuves aralocaspiens, les peuples nomades venus des régions septentrionales avaient doublement contribué à transformer la nature de la contrée au point de vue du sol et du climat, d’abord par la dévastation brutale, la destruction des jardins, des bois et des forêts, puis par le changement de régime, par la substitution des mœurs pastorales à celles des agriculteurs. Ils comblèrent les canaux ou du moins les laissèrent