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l’homme et la terre. — familles, classes, peuplades

la propriété privée. Jadis la plupart des économistes se plaisaient à trouver à l’appropriation du sol la plus noble origine, le travail. Mais l’observation de ce qui se passe chez les primitifs actuels montre que ce point de départ dut être bien exceptionnel. Le labeur accompli dans une communauté par l’un des membres profite naturellement à l’ensemble des co-participants, sans que pour cela ceux-ci songent à décerner à leur compagnon zélé un privilège qui le distingue absolument des contribules. Les inégalités de pouvoir produites par les luttes intestines et les guerres expliquent bien mieux les inégalités de possession qui s’introduisirent dans le gouvernement des sociétés.

figuration de cheval (grotte de combarelles)

1/8 grandeur du dessin préhistorique.

Mais, quelque forme qu’ait prise dans l’histoire l’appropriation d’un champ, d’un district ou d’une province par un seul individu, il reste toujours dans le souvenir des hommes et dans le droit traditionnel ou écrit des traces d’une forme antérieure de propriété collective. En maints endroits, les propriétaires de domaines particuliers travaillent ensemble les jours de fête et la terre redevient commune, notamment à Guam, l’île principale des Mariannes[1]. L’illusion du passé

  1. National Geogr. Magazine, May 1905, p. 236.