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l’homme et la terre. — la culture et la propriété

Les aliments pris dans le monde animal sont obtenus par la chasse ou la pêche ou par l’élève du bétail domestique et des volailles, ou bien encore par l’utilisation du lait et de 3 œufs. Il fut un temps où une partie notable du genre humain disputait sa proie aux carnassiers, mais, actuellement, le nombre des hommes vivant du produit de la chasse est devenu si minime qu’on peut le considérer comme n’ayant plus de valeur économique. Il n’en existe plus en Europe ; dans le continent africain, on ne peut guère citer comme se nourrissant surtout de gibier que de misérables tribus de nains, dans la partie équatoriale du continent, et les Bushmen du désert de Kalahari[1].

Toutefois, le vaste monde sibérien est encore parcouru par des tribus de chasseurs voyageant en d’immenses territoires à la recherche des animaux à chair nourrissante et à fourrure. L’Amérique, en ses deux continents, et l’Australie sont les terres où l’état primitif du chasseur est encore représenté par des peuplades typiques, d’ailleurs toutes réduites à un petit nombre d’hommes, à cause des difficultés de leur vie toujours errante en d’énormes espaces. Aussi n’y a-t-il plus, à proprement parler, de « peuples chasseurs ». Nulle part, dit Grosse, ils n’ont pu se développer assez puissamment pour mériter ce nom : il n’existe que des « tribus chasseresses ». Mais la pêche, dans les profondeurs marines, représente toujours une quantité notable de l’alimentation humaine, surtout le long des côtes poissonneuses, dans les îles du Pacifique, au Japon, et sur le littoral chinois, en Norvège et dans l’Amérique septentrionale. Des populations presqu’exclusivement ichtyophages se sont maintenues en divers parages insulaires et côtiers. Bien que la mer ne soit pas inépuisable et que, même, certaines espèces pourchassées par l’homme soient devenues rares, la valeur annuelle de la pêche n’a cessé d’augmenter parce que les gens du métier emploient des engins et des embarcations de mieux en mieux adaptés à la besogne, et qu’en divers endroits on a commencé le repeuplement des baies, de même que celui des lacs, des étangs et des rivières.

La part de nourriture que représente la chair des animaux domestiques, dans les pays européanisés de l’Ancien Monde et du Nouveau, est approximativement connue. On l’évalue à 20 milliards de kilogrammes, soit à une trentaine de kilogrammes par individu. En admettant, ce que

  1. Ernest Grosse, Die Anfänge der Kunst, p. 43.