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l’homme et la terre. — le nouveau monde et l’océanie

« emporium » de l’Amérique du Nord occupe aussi le bord d’une indentation du littoral, mais cette indentation, subdivisée en plusieurs replis qui forment autant de rades ou de ports distincts, a le grand privilège de se trouver complètement masquée par une île, Long-Island, laissant de chaque côté une issue vers la haute mer : la ville est donc parfaitement abritée, tout en gardant ses deux portes largement ouvertes. En outre, New-York, est assise à la bouche d’un fleuve assez large et puissant pour que son découvreur même, le Hollandais Hudson, y vît un bras de mer offrant un passage dans la direction du Pacifique ; du moins offre-t-il le chemin le plus facile vers la grande Méditerranée canadienne, et c’est grâce à lui, grâce aux voies ferrées qui l’accompagnent et au canal qui le prolonge, que New-York est devenu le port par excellence de toute la région septentrionale et centrale des États-Unis jusque par delà le Mississippi. Une ligne de dépression, marquée sur le sol avec une netteté singulière et formant pour ainsi dire un littoral intérieur à la racine de tous les appendices péninsulaires, se développe de la bouche du Hudson à l’estuaire du Potomac, parallèlement au « Pied-Mont » sous-alleghanien. Des cités considérables se succèdent en collier le long de cette dépression, aux endroits où les navires peuvent pénétrer le plus avant pour atteindre les marchés de la région peuplée. New-York est la première perle de ce collier des cités atlantiques, puis se suivent, dans la direction du sud-ouest, Trenton, Philadelphia, Wilmington, Baltimore, Washington. Parmi ces grandes agglomérations urbaines, Philadelphia et Baltimore ont une très grande force d’attraction commerciale ; cependant elles restent très inférieures à New-York et même en dépendent dans une certaine mesure, à cause des bien meilleures conditions, du plus ample outillage de ce grand port et de sa moindre distance de l’Europe : la plupart des immigrants, qui de l’ancien monde se dirigent vers les États atlantiques situés au sud de New-York, n’en prennent pas moins cette ville comme lieu de débarquement : c’est leur première étape sur le continent. Ainsi que les ports situés plus au sud, New-York est sous la latitude où les chemins maritimes sont presque toujours débarrassés des brouillards et des processions de montagnes glacées qui présentent tant de danger dans les parages plus septentrionaux.

L’ensemble de tous ces avantages a valu à New-York des progrès très rapides, plus considérables même qu’ils ne paraissent au premier abord.