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l’homme et la terre. — le roi soleil

Ne redoutant plus le danger, les vainqueurs s’empressèrent de se disputer les dépouilles, et Wallenstein, devenu trop puissant pour ses alliés, dut abandonner en disgrâce le commandement des armées. Il était renvoyé trop tôt, car les princes protestants, frappés à l’endroit sensible par l’édit de restitution, cherchaient un appui en dehors des frontières, en France et en Scandinavie. Le cardinal de Richelieu, devenu le véritable souverain de la France à la place du vacillant Louis XIII auquel il ne laissait que le décor officiel, fut, avec le soldat Gustave-Adolphe, le personnage qui rétablit l’équilibre des cultes et des États dans l’Europe centrale. Prélat romain, il ne laissait point discuter par ses sujets français les prérogatives de l’Eglise catholique, mais à l’étranger, il n’était plus embarrassé par sa foi et ne cherchait qu’à susciter des ennemis, fut-ce le pape, fût-ce même des protestants, à l’insidieuse Espagne et à l’orgueilleuse Autriche. Il y réussit et fournit l’argent aux princes confédérés, tandis que Gustave-Adolphe leur amenait son armée, constamment victorieuse. Mais la campagne du vaillant homme de guerre ne dura qu’une année, et le deuxième acte de la terrible lutte se termina en 1632 par la bataille de Lützen, où il mourut en plein triomphe. Aux grandes manœuvres stratégiques, d’ailleurs toujours accompagnées de brigandages, succéda un état général de chaos sur presque tous les points de l’Allemagne ; les massacres, les famines et les pestilences dépeuplèrent le pays et, de lassitude absolue, les survivants seraient probablement retombés sous la domination de l’Autriche si les troupes envoyées par Richelieu ne s’étaient unies aux Suédois et n’avaient fait campagne à côté d’eux pendant les seize années que dura encore cette interminable guerre.

Enfin, après sept années de conférences préliminaires, en 1648, la paix dite de Westphalie fut signée à Münster et à Osnabrück par un acte dont le dédoublement sauvegardait de niaises susceptibilités de préséance. Les discussions oiseuses des plénipotentiaires semblaient devoir durer aussi longtemps que les campagnes des chefs de guerre ; les opérations militaires continuaient normalement pendant que l’on discutait les conditions de paix, et lorsque les diplomates réussirent à se mettre d’accord, les protestants étaient en train de reconquérir Prague : la guerre de Trente ans se terminait à l’endroit où elle avait commencé. Les petits princes lésés par les terribles événements, les bourgeois ruinés, les peuples décimés furent oubliés dans le règlement définitif, mais les