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l’homme et la terre. — découverte de la terre

première décade des voyages vers les terres nouvelles, s’aventura le plus loin dans les mers inconnues, mais son importance lui vint surtout des récits qui en furent publiés après le retour d’Amerigo Vespucci. Dès l’année 1503, une lettre qu’il avait écrite à son ami Lorenzo Medici était traduite en latin, puis les années suivantes elle paraissait dans les langues modernes de l’Europe. En 1507, d’autres récits, qui d’ailleurs contenaient de graves erreurs, les Quatuor Navigationes, étaient publiés à Saint-Dié comme le recueil de lettres adressées par Vespucci au gonfalonier Soderini de Florence, et ces documents, incorrects mais rédigés par quelque scribe d’après un mémoire certainement authentique, furent accueillis par le populaire avec une curiosité passionnée et firent connaître de tous le nom du voyageur Amerigo. Tandis que celui-ci avait toujours proposé de donner au continents récemment découverts l’appellation de « Nouveau Monde ». l’éditeur des Quatre Navigations, Basin de Sandocourt — ou peut-être son prote, Waldseemüller, plus connu par son pseudonyme de Hylacomilus, prononça le premier le nom d’Amerigo comme devant être celui qu’aurait à porter désormais la grande terre occidentale. Pendant tout le seizième siècle des vocables géographiques divers furent appliqués, dans les livres et sur les cartes, aux terres que les Espagnols désignaient officiellement avec Colomb par le terme d’ « Indes occidentales » ; mais au dix-septième siècle le mot « Amérique » prévalut définitivement, aidé sans doute par l’euphonie que présente la série des noms continentaux : « Europe, Asie, Afrique, Amérique ».

Toutefois, cette hypothèse ne saurait être considérée comme certaine, et il se pourrait que, suivant des opinions bien accueillies par l’opinion publique américaine, entraînée peut-être par un chauvinisme inconscient, le nom du double continent fût d’origine indigène. D’après Alphonse Pinard, le grand marché d’Ameraca (Maraca, Amaracapana), situé près de la moderne Cumana, aurait été le parrain du Nouveau Monde. D’après Jules Marcou, les montagnes du Nicaragua dites sierra Amerrique auraient été signalées à Colomb, dans son voyage de 1502, comme celles qui fournissaient l’or de Veragua, et ce nom, connu des chercheurs d’or, aurait fini par être attribué à l’ensemble des terres occidentales. Pourtant il ne parait point qu’un seul document mentionne cette chaîne de l’Amérique centrale avant l’ouvrage de Thomas Belt, The Naturalist in Nicaragua, publié en 1871. tandis qu’une carte de 1507, retrouvée par J. Frischer, porte déjà le nom d’Amérique.