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HISTOIRE D’UNE MONTAGNE.

Tous les animaux le haïssent, et lui les hait tous ; mais il n’ose attaquer que les faibles et les blessés. La frénésie de la faim peut seule le pousser à se jeter sur de plus forts que lui. En revanche, que d’empressement à se précipiter sur une proie déjà tombée, sur un ennemi qui ne peut se défendre ! Même lorsqu’un loup vient de s’abattre, vivant encore, sous la balle du chasseur, tous ses compagnons s’élancent sur lui pour l’achever et se disputer ses restes. Certes, la sanglante Rome a chargé sa mémoire de tous les forfaits imaginables ; elle a rasé des villes par milliers, écrasé des hommes par millions ; elle s’est gorgée des richesses de la terre ; par la perfidie et la violence, par des infamies sans nombre, elle est devenue la reine du monde antique, et pourtant, malgré tous ses crimes, elle s’est calomniée en se donnant une louve pour mère et pour patronne. Le peuple dont les lois, sous une autre apparence, nous régissent encore, était certainement dur, presque féroce, mais il n’était pas aussi mauvais que pourrait le faire croire le symbole choisi par lui !

Pour celui qui chérit la montagne, c’est un