vingt-cinq tonnes de sucre par hectare. De plus, nous pourrions cultiver toutes les plantes d’Europe. Voilà pourquoi le Chassaigne le recommande de nous apporter des graines de toute espèce de légumes, surtout de salade, de radis, de persil, de choux-fleurs. Quant à moi, je te demande une petite boussole pour nos promenades lointaines dans la sierre ; si tu apportes aussi un baromètre, ou bien un thermomètre, nous pourrons, à l’aide d’une marmite, nous persuader que nous mesurons les hauteurs. Nos amis nous croiront.
Mon voyage de la Sierra comptera parmi mes voyages les plus baroques et les plus pittoresques. Dans une lagune, celle du Navire Brisé, notre honnête bourrique s’enfonce dans la vase à trois ou quatre cents mètres du bord, et nous, pour la sauver, jetons sa charge à l’eau, quitte à ne pas la retrouver plus tard, et, remplis de la force du désespoir, nous la traînons jusqu’à bord, en la soulevant par la queue, par le ventre, par les pattes ou par les oreilles. Le lendemain, il faut trouver l’embouchure de l’Enea[1] en passant sur une barre étroite et longue, où la mer vient constamment déferler en fortes vagues, entre les crocodiles qui gisent lourdement dans l’eau limoneuse du fleuve et les requins, les tintoreras[2] et les raies électriques qui, du côté de la mer, forment un cordon sanitaire. C’est accompagnés par ces messieurs qui daignent bien nous escorter que nous passons et repassons douze fois la